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13 mars 2019 3 13 /03 /mars /2019 10:23

J’ai toujours aimé les langues, mais jamais je n’aurais pensé apprendre celle que j’ai découverte il y a quelques semaines. En effet depuis le début de l’année je rejoins régulièrement une quinzaine d’autres personnes pour me familiariser avec… la LSF.

 

Quézaco me direz-vous la LSF ? Il s’agit tout simplement de la langue des signes française.

Parce qu’ils se sont retrouvés dans la nécessité de devoir communiquer avec leur petite fille sourde, de jeunes voisins ont créé une association afin dans un premier temps de pouvoir être financés par la CAF pour leur apprentissage de cette langue. En effet pouvoir se former coûte cher et des particuliers ne pouvant bénéficier de subventions quelconques ils ont donc créé l’association « Sans ses oreilles ». Le statut d’association leur permet d’accéder à des avantages et des financements qu’ils n’auraient pu avoir autrement. Ils bénéficient par exemple de la présence d’une interprète dans la classe de leur fille : trois heures par semaine coûtent déjà 300 €. Et leur association leur a permis de mettre en place des cours de langue des signes française hors temps scolaire, ouverts à tous : les trois heures de cours coûtent 100 € (oui il vaut mieux être interprète que professeur apparemment). Bref tout cela coûte cher, aussi subventions et aides diverses seront les bienvenues.

 

L’enseignante qui vient dispenser ces cours est une jeune entendante, hyper dynamique et qui déborde d’un enthousiasme communicatif qui fait que ces séances sont un vrai plaisir. Au début j’étais assez dubitative, j’y suis allée par curiosité plus qu’autre chose et aussi par solidarité peut-être, et puis j’y suis revenue par pur égoïsme tout simplement parce que j’ai trouvé ça génial ! La prof nous a fait un rapide tour d’horizon de ce qu’était cette langue, ses origines et son histoire, ainsi qu’un petit historique de la situation des personnes sourdes à travers différentes époques. Les premières choses que je me rappelle avoir apprises c’est qu’il est important de parler de « langue » des signes et non de langage, la différence est subtile mais capitale aux yeux des sourds : il ne s’agit pas d’un idiome de seconde zone mais d’une réelle langue avec sa syntaxe et ses codes, parfois différents des langues parlées. La deuxième chose que j’ai retenue c’est qu’il était complètement erroné de parler de « sourds-muets » pour désigner les personnes sourdes : le seul organe qui ne fonctionne pas ce sont bien les oreilles, leur appareil vocal est tout à fait normal mais simplement les sourds n’ont jamais pu s’en servir car n’entendant pas les sons ils sont incapables de les reproduire, c’est logique. D’ailleurs nous qui ne sommes pas loin de la petite sourde en question nous pouvons attester qu’elle n’a aucun problème de ce côté-là et sait parfaitement se faire entendre à défaut de se faire toujours comprendre!

 

Loin d’être purement théoriques (les éléments historiques constituent davantage des parenthèses que du cours proprement dit) ces cours sont très vivants, adaptés aux situations quotidiennes (apprendre à se présenter, désigner les objets, les couleurs, etc.) et rendent bien compte également de la vivacité de la langu. En fait c’est une langue beaucoup plus réactive que nos langues parlées et surtout écrites, elle est capable de s’adapter et de changer en fonction de l’évolution des événements ou des circonstances: par exemple un signe servant à désigner une célébrité va pouvoir changer en fonction de l’évolution de cette personnalité-même, selon qu’elle sera connue à un moment particulier par un fait particulier. Je ne sais pas trop rendre compte de cela mais Anaïs, la prof, l’a très bien expliqué en prenant l’exemple du footballeur Neymar dont le signe avait changé depuis qu’il était moqué pour ses tendance à tomber et à se blesser facilement sur le terrain.

 

Bref tout cela est vraiment passionnant et je ne peux que vous conseiller d’aller découvrir cette langue si vous en avez l’occasion. Mais les occasions sont parfois bien rares, notamment dans nos territoires ruraux, voire hyper-ruraux: il n’y a qu’une seule enseignante dans tout le Lot par exemple…

Ces cours sont ouverts à tous bien sûr, et le public y est très divers. Il y a en premier lieux les parents de la petite sourde, des parents d’enfants sourds déjà grands qui n’ont jamais pu bénéficier de ce type de cours et qui ont fait comme ils pouvaient avec leur enfant, des personnes travaillant dans la petite enfance et qui souhaitent aussi communiquer avec des enfants soit tout petits soit différents (petit autiste par exemple que garde une assistante maternelle), une lycéenne qui souhaite devenir éducatrice spécialisée, des voisins et des proches de la petite... bref des profils bien différents.  

 

Bien sûr il y a aussi le aussi le personnel (cantine, garderie) et les enseignantes de l’école où elle est scolarisée. Elle est en maternelle mais les autres enseignantes du RPI viennent également afin de se préparer à l’accueillir dans les meilleures conditions lorsqu’elle changera de classe. A l’heure où l’Education Nationale parle tant d’inclusion des handicapés dans l’école il est vraiment honteux de voir que ce sont aux parents de se débrouiller pour financer cette inclusion, et aux maîtresses de prendre sur leur temps personnel (samedi matin) pour se former, mais c’est un autre débat.

 

 

 

A découvrir, le témoignage d'une jeune femme sourde ICI

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commentaires

L
J'en ai entendu parler :j'ai fréquenté une jeune sourde dans ma jeunesse. Je ne connaissais rien aux signes, mais quand je parlais, elle comprenait mes propos et me répondait par des grognements un peu articulés. il m'a fallu du temps pour saisir ce qu'elle le disait. Une expérience que je ne peux oublier tant Marie-Louise était adorable et joyeuse. <br /> Je trouve intéressant ton article et pas seulement parce que tu parles de la langue des signes. Tu dis tout haut ce que tout le monde devrait savoir à propos de cette formation mais l'ignore parce qu'on ne l'évoque jamais. Merci à toi de lever le voile sur l'absence de formation : voilà en effet un sujet qui devrait être pris en considération par l'E.N. et devrait proposer des initiations pour ne serait-ce que pour les enseignants qui doivent se sentir démunis face à une personne sourde.
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S
Une découverte dont tu nous parles avec passion! Je réalise aussi que je ne connais pas de sourd(e)s dans mon entourage. Quant à mes oreilles, difficile de les ignorer; c'est de naissance...
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