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21 février 2021 7 21 /02 /février /2021 16:36

Après s'être invité à table avec les lentilles, un bon menetou-salon et même une tentative personnelle de pâté berrichon,, voilà que le Berry squatte ma table de chevet. Hasard de la pioche dans la pile de livres en retard, voilà qu'après Les Maîtres sonneurs de George Sand qui m'ont fait voyager des plaines du Berry jusqu'aux forêts épaisses du bourbonnais, je viens de commencer La Rabouilleuse de Balzac dont l'action se situe à Issoudun.

 

Où quand Balzac rencontre les Blankass... ce que c'est que la culture tout de même...

 

Vous ne voyez pas le rapport entre Blankass et Balzac, du moins avec La Rabouilleuse? C'est pourtant simple: les Blankass sont berrichons, originaires d'Issoudun où se passe donc l'action du roman. Le précédent groupe des frères Ledoux, qui n'avaient alors pas vingt ans, s'appelait Zéro de conduite, un de leurs titres étant justement "Down in Issoudun". Attention pépite.

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25 novembre 2020 3 25 /11 /novembre /2020 16:49

Bon comme apparemment il y a peu de chance qu'on se retrouve bien nombreux autour d'un petit gueuleton en fin d'année, au moins j'aurai le plaisir de la lecture de ces quelques nouvelles. Et en plus j'ai fait une bonne action. Deux si on tient compte du fait que j'ai fait travailler la librairie locale. On fait ce qu'on peut...

A table!...de chevet.
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2 février 2019 6 02 /02 /février /2019 17:40
Comment sommes-nous devenus si cons ?

En voilà une question qu'elle est bonne hein?

 

Ce livre du linguiste Alain Bentolila (éditions First) que j’ai commencé il y a quelques jours devrait satisfaire cette saine et légitime curiosité, bien que j’aie déjà ma petite idée ! D’ailleurs dès le début du livre les éléments de réponse ne sont guère surprenants : Télévision la grande anesthésie et Internet et réseaux sociaux : peu importent les contenus, seuls comptent les tuyaux »… je crois qu’on est sur la bonne voie !

L’auteur scrute nos comportements mais aussi l’évolution de certaines institutions et analyse comment petits bouts par petits bouts on en est arrivé à faire le deuil de notre intelligence et de notre sens critique, par facilité, par confort et paresse…

Voilà qui fait réfléchir et qui doit nous interroger sur notre intelligence collective mais aussi sur la façon dont nous avons bien souvent laissé partir à vau-l’eau nos propres capacités intellectuelles.

 

Comme disent mes enfants « ça fait flipper »…

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17 août 2016 3 17 /08 /août /2016 20:26

L'édition originale du Grand Larousse regorge de perles qu'a répertoriées Pierre Enckell et qui constituent un florilège de bêtise et d'ignorance parfois ce qui est un comble pour un ouvrage qui se veut savant, mais c'était une autre époque. Quoi qu'il en soit, parmi les perles qui m'ont bien fait marrer, je vous livre celle-ci:

 

«Le docteur Demeaux affirme que, depuis qu'on fume dans le département du Lot, la santé générale s'est améliorée.»

 

Bon, au cas où, je devrais peut-être m'y remettre...

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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 14:16

Oserais-je vous inviter à pousser la porte de La Dernière demeure?... Bon ce n'est pas fini mais on fait ce qu'on peut.

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5 juin 2014 4 05 /06 /juin /2014 06:00

 

Au hasard de mes lectures je suis tombée sur l’article d’une libraire déplorant la simplification des œuvres pour la jeunesse. Lisez vous aussi, c’est édifiant: « On prend les enfants pour des imbéciles »

 

Enfant je me rappelle bien avoir lu des livres de la Bibliothèque Verte, moins de la Bibliothèque Rose car j’étais un peu garçon manqué et je préférais l’aventure aux histoires de filles. Puis j’ai découvert une nouvelle littérature de jeunesse lorsque j’ai exercé en tant que professeur. J’ai ainsi découvert des ouvrages écrits pour les jeunes adolescents, les collégiens, avec comme toile de fond l’aventure, les relations sentimentales ou des problématiques actuelles comme les familles recomposées par exemple. Tout ça c’est bien joli, cela « parle » aux enfants et ils sont censés s’identifier plus facilement aux personnages, leur lecture en serait ainsi facilitée. OK tout ça c’est toujours bien joli mais au final la très grande majorité de cette littérature de jeunesse possède un gros défaut : la qualité de la langue. Certes tout cela est la plupart du temps bien écrit mais pour en avoir lu un certain nombre, j’ai toujours trouvé que tout cela restait finalement très pauvre du point de vue linguistique : l’usage des temps est trop souvent limité au présent et à l’imparfait, le vocabulaire est simplifié au possible, tout cela est plat et semble être écrit « au kilomètre ». Bref la littérature de jeunesse d’aujourd’hui est bien trop souvent ce que la collection « Harlequin » est au roman classique.

Pourquoi lorsque l’on s’adresse aux enfants on devrait tout leur simplifier ? Des collégiens ne sont-ils pas censés connaître le passé simple ou le subjonctif ? Ne disposent-ils pas d’un vocabulaire suffisamment riche pour lire une grande variété de textes ? Et dans le cas contraire ne sont-ils pas familiarisés avec l’usage d’un dictionnaire ? Hélas mon expérience me pousse à dire que la réponse à ces questions est bien trop souvent négative : l’apprentissage de la conjugaison (et de la grammaire) n’est plus une priorité, l’acquisition du vocabulaire non plus, quant à l’utilisation du dictionnaire s’il en est bien question dès le primaire en théorie, dans les faits c’est loin d’être un réflexe pour les enfants. Et ce n’est pas en leur proposant des textes édulcorés et plats que cela va changer.

 

Je ne suis pas une adepte du « c’était mieux avant » mais lorsque je me rappelle de mes lectures de jeunesse des noms me viennent : Victor Hugo, Jules Verne, la comtesse de Ségur… Une langue parfaite et riche, des mots choisis même si certains étaient parfois un peu désuets, je n’ai pas le souvenir de m’être jamais sentie face à une langue étrangère. Et ce n’est pas non plus parce que les histoires se déroulaient au siècle précédent (voire encore avant) que je ne parvenais pas à m’identifier aux héros. Comme c’est en forgeant qu’on devient forgeron, il est évident que mon amour de la belle langue vient de ces lectures, et de celles qui ont suivi. C’est pour cela que je déplore moi aussi que l’on donne trop souvent à lire cette bouillie sans goût aux enfants. D’ailleurs la comparaison est tout à fait parlante avec la nourriture : éduquer à la variété et au goût les petits est la meilleure façon d’en faire des gastronomes plus tard, en langue c’est la même chose : donnons-leur à lire de bons textes, car de bons lecteurs seront de bons locuteurs et de bons « écrivants », et leur maîtrise d’une langue riche est le meilleur moyen d’en faire des individus sachant exprimer clairement et justement leurs idées. Cela contribuera à forger leur sens critique, et donc les rendra moins susceptibles d’être manipulés par le discours des autres. Non ?

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7 octobre 2013 1 07 /10 /octobre /2013 08:21

 

 

C’est peu de dire que mes lectures sont éclectiques en ce moment : après avoir bien ri avec Nos vies de cons de Pascal Fiorretto, j’ai entamé un livre étonnant qui relate les différentes morts sinon énigmatiques du moins parfois confuses de certains grands noms de l’histoire de France. Par « mystérieuses » il ne faut pas s’attendre à des révélations percutantes du point de vue du décès lui-même : pas d’enlèvement par des extra-terrestres déguisé en banal accident, pas de suicide maquillé non plus. Non, les mystères que souhaite lever l’auteur sont tout simplement d’ordre médical. Augustin Cabanès, médecin et chercheur, passionné d’histoire a voulu dès ses premiers ouvrages allier science et histoire, et comme il est en outre assez bon écrivain, cela donne des récits étonnamment passionnants et « lisibles » malgré le poids de détails médicaux donnés.

Au vu des éléments connus de tous, et à l’aide parfois de quelques documents inédits ou méconnus, le Dr Cabanès procède à un examen des derniers instants des rois, reines et princes de France et livre son propre diagnostic, corroborant les conclusions des médecins de l’époque ou au contraire les contredisant et imposant une nouvelle explication, à la lumière des connaissances de ce XXe siècle naissant (l’ouvrage date de 1901).

Passionnant en tous points, que ce soit du point de vue du fond comme du style, cet ouvrage nous présente les grands de ce monde, de Charlemagne à Napoléon III, comme ce qu’ils sont vraiment : de simples mortels. Et quelles morts ! En lisant les comptes rendus des médecins et le récit de Cabanès, on se réjouit de la découverte des antalgiques et des antibiotiques ! Gangrène, putréfaction des chairs, boursouflures, abcès et infections en tout genre, être malade en ce temps-là ce n’était pas une sinécure. Et que dire des remèdes qui étaient parfois pire que le mal, la fameuse saignée n’étant qu’une partie de plaisir. La lecture des procès-verbaux des autopsies de tous ces grands personnages met sacrément à mal la monarchie de droit divin : ouverts et découpés, même avec le plus profond respect par les chirurgiens, les corps de ces parfois dieux vivants sur terre sont remis à leur place. En marge de ces relations, le Dr Cabanès ajoute parfois quelques anecdotes comme les pérégrinations du cœur de celui qui serait devenu Louis XVII s’il avait vécu, ou du moins du corps que l’on a présenté comme tel (substitué en prison au vrai fils de Louis XVI, évadé de la prison) : subtilisé par un des chirurgiens ayant pratiqué l’autopsie, puis dérobé à celui-ci, retrouvé, cédé, rendu...

 

 

Il m’a fallu à peine deux semaines pour avaler ces deux tomes (en poche). Et comme je suis dans une période « j’aurais dû mieux écouter les cours d’histoire au lycée » voici ce qui m’attend sur ma table de chevet : Les hémorroïdes de Napoléon et Les testicules de Jeanne d’Arc. Tout un programme.

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5 octobre 2013 6 05 /10 /octobre /2013 07:58

 

Le Chat de Philippe Geluck

 

 

Comme promis, voici un autre extrait de Nos vies de cons, de Fioretto. Je suis sûre qu’il parlera à plusieurs de mes lecteurs qui ont touché de près ou de loin à l’enseignement (ils se reconnaîtront). Personnellement pour avoir fréquenté l’Éducation Nationale, je dois dire que je trouve ce passage assez savoureux.

Attention toutefois, comme tout ce qui m’enchante, c’est très très second degré.

 

Il s’est fait maître

 

Au fil des réformes trimestrielles de l’Éducation Nationale, l’instit s’est successivement appelé « instituteur », « professeur des écoles », puis plus récemment « enculé de sa race ». N’ayant jamais trouvé la sortie de l’école, l’instit ne connaît de la vie que les classes surchauffées où flotte une odeur d’enfants propres, décorées de dessins gondolées à la gouache. Il n’a donc qu’une vague idée du monde du dehors qu’il n’entrevoit qu’à travers les fenêtres embuées de sa classe trop nombreuse et sait à peine qui est Kylie Minogue. C’est d’ailleurs pourquoi la plupart des instits votent encore à gauche et sont rigoureusement incapables d’exécuter la moindre figure de Tecktonik. Autre signe d’indécrottable ringardise, l’instit s’échine à former les gamins au monde tel qu’il devrait être au lieu de les préparer à la concurrence libre et non faussée qui les attend à l’extérieur et au tournant. Pire, pour sauver des élèves turbulents de la délinquance – au nom de valeurs qui sentent l’ardoise rance, la craie humide et l’éponge moisie –, il gaspille l’argent public en pâte à modeler. Sa légendaire paresse, qui lui est si souvent reprochée par les rentiers du CAC, ne résiste pourtant pas à une étude objective. Des sociologues ont récemment démontré que l’instit assure à lui tout seul, du haut de son petit bureau en bois, le boulot de 10 flics et de 20 parents divorcés. Sans oublier ses activités annexes d’enseignant, éducateur, animateur, psychologue, entraîneur, assistante sociale, tuteur, infirmière... S’il est vrai qu’il touche en un mois ce que touche un footballeur en prenant sa douche, l’instit se rattrape avec ses vacances scandaleusement longues qui n’ont rien à envier à nos animateurs télé. Et quand il travaille enfin, le gros de son activité consiste à commander les bouquins de l’École des Loisirs, à recompter ses gommettes et à préparer la prochaine classe nature (ce qui lui fera une semaine de vacances supplémentaire à la campagne). Dès qu’il en a marre de se faire bastonner par les parents d’élève ou qu’on mette le feu à sa voiture ou à son expo sur les rapaces, l’instit part en dépression carabinée dans une luxueuse maison de repos. À son retour, bourré de verveine, il annonce à son inspecteur d’académie qu’il se sent de nouveau prêt à enseigner l’écriture et la poésie à des petits cons décérébrés (que n’importe qui de normal aurait envie d’étrangler au bout de dix minutes). C’est la preuve qu’il est loin d’être guéri et qu’il va bientôt repartir plomber les comptes de la Sécu.

 

Signe particulier : l’instit passe sa vie à chercher une rallonge. Il peut s’agir d’une rallonge électrique, pour projeter des diapos sur les volcans ou d’une rallonge budgétaire pour permettre à Mourad et Kimberly d’aller à la cantine avec leurs camarades. Quand je pense à ce que mes instits ont fait de moi, fils de prolo qui ne demandait qu’à travailler à la mine, j’ai des renvois de gratitude. C’est dire s’ils ont réussi leur travail de sape intellectuelle.

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29 septembre 2013 7 29 /09 /septembre /2013 19:14

Pour tous les "vieux cons" comme moi qui sans se sentir dépassés par le monde moderne ont parfaitement compris sa complète vacuité, je ne saurais trop conseiller la lecture de Nos vies de cons, de Pascal Fioretto. Ce « petit dictionnaire énervé » ainsi que le mentionne le sous-titre, passe en revue les travers de notre société moderne pour notre plus grand plaisir. C’est souvent second degré, parfois cynique mais en tous cas toujours très drôle. Tout y passe, Internet et les geek, les portables et la télé mais aussi les jeunes, les vieux, les profs, les voyages organisés ou même les humoristes.

Hier soir j’ai été prise d’un fou rire inextinguible qui a fini par inquiéter ma moitié assoupie. Je crois qu’il y avait là-dedans aussi du rire nerveux, mais bon sang ce que ça fait du bien, ça faisait longtemps que cela ne m’était pas arrivé.

Histoire de vous dérider un peu et de vous mettre en joie pour ce début de semaine, je vous livre un extrait de ce bouquin qui n’a qu’un défaut : il se lit beaucoup trop vite.

 

Le Tamalou (là ou là?)

Outre sa collection d’analyses d’urine et d’ordonnances, le tamalou se reconnaît à ses boîtes de médicaments alignées devant son assiette, à sa carte vitale Gold et à sa propension à avoir mal ici, là, et aussi là, quand il fait humide. Il doit son surnom au rictus de souffrance qui déforme ses traits quand on lui demande « Mais enfin bordel, tu as mal où, cette fois ?! » Le tamalou révèle aussitôt avec gourmandise que ses articulations le torturent, son genoux le lance, sa vésicule le tire, sa glycémie le mine, son ulcère le vrille et son nez le coule. Et si vous lui faîtes remarquer que ce matin même c’était ailleurs qu’il souffrait, le tamalou vous dévisage, fou d’angoisse : « Toi aussi tu as remarqué que je radote ? Je n’arrête pas de perdre mes clés, mes cheveux et mes illusions sur Bayrou. Je vais demander à passer un scanner. Mais en couleurs, parce qu’en noir et blanc ils n’ont rien trouvé. »

 

 

Le passage sur les instits est plus que savoureux, je vous le réserve pour une prochaine fois.

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16 février 2013 6 16 /02 /février /2013 20:24

Qu’il est bon de se replonger dans de saines lectures après une période de disette intellectuelle. Faute de temps et aussi d’envie, voilà un petit moment que je n’avais rien lu d’intéressant, ou même ne serait-ce que divertissant, ce qui est déjà pas mal. Mon dernier livre entamé avait été Maudit karma, d’un auteur allemand, qui ne m’avait pas vraiment fait rire (publicité mensongère) et n’avait pas je crois changé grand chose non plus à mon karma. Le propos était léger et se voulait pourtant profond : l’aventure d’une animatrice TV décédée réincarnée en fourmi puis en d’autres animaux tout aussi éloignés de sa vie d’avant et qui par ses différentes étapes parvenait à saisir la beauté de la vie, faisant amende honorable et devenant meilleure une fois ressuscitée. Personnellement j’en suis restée au stade de la fourmi car je dois dire que je me suis copieusement ennuyée dans les quelques pages que j’ai lues. J’aurais du me méfier puisque le livre était présenté comme un best-seller un peu partout, et d’habitude ce genre d’argument est rédhibitoire pour moi, mais j’avais envie de légèreté et de littérature étrangère, alors… bon la prochaine fois j’essayerai Shakespeare, ce sera moins risqué.

Ce roman trône à peine entamé sur ma table de chevet mais il a été très avantageusement remplacé par un essai du linguiste Alain Rey : L’Amour du français, sous-titré joliment « contre les puristes et les censeurs de la langue ». Inutile de vous dire le grand écart qu’il faut faire pour passer de Maudit karma à un essai de linguistique, mais rien de tel qu’un peu de gymnastique cérébrale. Tout au long de cet essai, goulûment avalé, et à travers l’histoire de notre langue, Alain Rey se plaît à décrire l’enrichissement permanent du français, et de toutes les langues en général, et comment cette langue n’a cessé de se construire par les apports des autres langues, choses que l’on savait déjà mais que l’auteur a cru bon de rappeler à l’heure de la mondialisation et où la plus petite évocation d’une réforme de l’orthographe donne de l’urticaire à bon nombre de têtes pensantes. Ce long voyage à travers le français nous dresse le portrait d’une langue aux mille facettes, noble et populaire à la fois, conservatrice et moderne mais dans le fond ouverte et souple, au contraire de l’image figée dans laquelle certains spécialistes voudraient l’enfermer. Alain Rey explore pour cela les textes engendrés par les différents pouvoirs de toutes les époques mais aussi les vecteurs plus officieux tels les médias ou les littérateurs de tous poils. Morceaux choisis :

 

« Entre la Pouvoir, qui se sert du langage pour satisfaire ses appétits, entraîner les humains, les tromper peut-être, les séduire et les entraîner toujours, et la Poésie, qui sert le langage, le nourrit, l’enrichit et lui donne force, les amoureux du français ne sauraient hésiter. Confier la langue aux « poètes » est hasardeux, la confier aux politiques désastreux : cela consiste à s’évader dans l’imaginaire de la volonté d’ordre. […] Les débats sur l’école, en France, où une minorité cherche à préserver la Poésie (on dit, par pudeur, « littérature »), se trompent parfois d’adversaire. Le danger [est] la paresse, le dégoût d’apprendre, la croyance collective soit en l’argent, soit dans quelque religion mortifère, l’appétit pour la distraction sotte et le rire gras. Si le pouvoir laisse les médias, d’essence publicitaire, construire la personnalité enfantine, l’école ne peut plus être que thérapeutique. Ce serait à un « ministère de la santé mentale » de s’en occuper. »

 

« Jacques Duclos ou Colette, elle qui tambourinait ses rcomme ses compatriotes bourguignons et écrivait comme une déesse, n’étaient pas montrés du doigt, alors qu’aujourd’hui, politiciens et vedettes du spectacle (c’était le cas pour Colette) se doivent d’éviter une prononciation pourtant encore usuelle en milieu rural bourguignon ou en Occitanie, mais peu appréciée socialement, ce qui, lorsqu’on y songe, est d’une totale extravagance. Un rouleau compresseur des accents, des syntaxes et des vocabulaires régionaux a fait du français officiel, médiatique, politique, un idiome fade, au rythme monotone, pauvre en vibrations, rythmiquement sec – sauf en Occitanie, où les muettes que sont devenues les voyelles écrites ese remettent à parler, et peut-être à chanter. […] Depuis Malherbe on s’échine à aplanir le français : le succès de cette opération au nom de la clarté et de l’élégance a dépassé les espérances. Mais il semble que le pendule reparte dans l’autre sens : les résistances se manifestent, les accents « locaux » n’ont plus honte, les mots régionaux reprennent vie, des formes chantantes de français survivent hors de France, la greffe créole ranime le français des Caraïbes et de l’océan indien, le Québec chante avec Vigneault et le français de la radio, de la télé, de la politique et de la publicité finira peut-être par souffrir de sa triste uniformité, à laquelle il remédie par les hurlements et les modulations burlesques de la publicité et des animateurs de la bassesse. »

 

« Les règles de formation des mots nouveaux, internes à la langue, fonctionnent plus ou moins bien. […] en français, c’est la catastrophe. Faites un mot nouveau avec des éléments connus, assemblés en bon ordre, et on sera, autour de vous, étonnés ou indignés (à ce propos la pression sociale me déconseille d’écrire « étonnage » ou « étonnerie » ; non plus que de parler d’un grand « indignement », puisque la place est prise par un adverbe, ni d’ « indignesse » ou d’ « indignitude »). Cette langue, décidément, est (dans son lexique) pauvre, engoncée, réticente, constipée. Et pourtant, elle est, comme toute langue, munie d’un lexique gigantesque, insoupçonné, dont nous n’utilisons que des miettes dérisoires. »

 

 

Et de conclure :

« L’amour des Antillais pour le français passe par celui de leurs créoles, celui des Québécois par le combat jaloux contre la fascination, et de la langue anglaise, et du modèle européen du français. Pas d’amour sans rencontre, d’amour et de haine sans contacts, sans mélange […] »

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